Passage à vide
Ras-le-bol intégral ce matin alors que tout se mélange dans ma tête et ma vie.
Doute lancinant côté écriture. À quoi ça mène? Qu'est-ce que j'en retire? Pourquoi tant d'efforts et de temps investis pour des graines et l'oubli en retour?
Janus se révèle un cul-de-sac. Manque d'inspiration. Projet flou. Une histoire encore décousue. Pas assez de matériel pour m'y accrocher. Pas mûr. À reposer sur la tablette, donc.
Émergence d'un autre "vieux" projet, Orion. Cette fois, j'entrevois un début, un milieu et une fin. Quelque chose de ténu, c'est vrai. Mais concret. Un peu.
Mais je doute. Parce que je sais que j'ai eu des étincelles de certitude face à Janus. Qui se sont éteintes aussi rapidement qu'elles avaient surgi. Pour me laisser ensuite déroutée. Dans le noir. Alors je redoute que le phénomène se répète. Encore. Et que, dans quelques jours, quelques semaines, j'arrive encore au même constat d'échec avec Orion.
J'ai tant d'autres choses à faire. Des choses concrètes. Des choses qui ont un effet réel. Pour lesquelles on me paie, en plus. Pour lesquelles je suis qualifiée. On m'a proposé récemment une autre responsabilité. Qui va me prendre des heures et des heures. Je pense dire non. Je veux protéger mes heures d'écriture. Mais à quoi bon? Alors que je sais qu'on a besoin de moi, que je peux être utile. Dans la "vraie" vie.
Enthéos peut presque être considéré comme un succès littéraire dans le portrait culturel québécois. Mais je n'ai même pas vendu 1000 exemplaires. On vient de m'apprendre que ma présence au Salon du Livre de Québec n'est pas assurée. J'ai du mal à comprendre. Je n'aurai même pas eu l'occasion de faire un 360o sur l'année littéraire de mon livre.
Pourtant, hier seulement, deux courriels reçus. Deux lecteurs qui m'écrivent avoir lu et aimé Enthéos. Et attendre impatiemment le prochain. J'en reçois encore régulièrement, de ce type de messages. Parfois, ces échanges se prolongent et se développent même en amitié épistolaire. Ça me fait un bien fou, puis le doute se réinstalle.
Je ne sais plus quoi penser.
Aujourd'hui, c'est lundi. Je dois écrire. Mais j'ai aussi une pile de corrections de travaux d'étudiants. Une pile bien réelle. Concrète. Des heures qui fileront, bien investies. Le reste... à quoi bon?
Illustration: Brown reflexion par Alberto Ocon.