Un oeil extérieur

Écrire, c’est quelque chose d’intime. De très personnel. Tout au long du processus de rédaction, il n’y a que nous, que notre voix dans notre tête, devant la page blanche qui se remplit, au fil des heures, de mots, d’idées, de concepts. Des personnages prennent vie. Une histoire se tisse. Un microcosme se crée. On finit par fusionner avec notre histoire.

Et puis, un bon jour, le travail est achevé.

On se retrouve devant une pile de papier imprimé. Notre roman.

Je ne sais pas si certains auteurs arrivent à se détacher suffisamment de leur œuvre pour la « voir » véritablement, avec un regard neutre. La lire, comme elle sera lue par quelqu’un d’extérieur. Par quelqu’un qui, lui, n’aura pas cette relation symbiotique avec elle.

Moi pas.

Bien sûr, j’ai fait lire ce deuxième roman à quelques personnes. Mes proches. Ceux qui ont spontanément manifesté le désir de le lire. Je n’ai eu que des critiques positives. Sauf pour mon titre qui ne faisait pas l’unanimité… Mais là, j’avais besoin de plus. Je veux savoir ce que j’ai à corriger. À exploiter. Bref, j’avais besoin que quelqu’un qui ne me soit pas lié par le sang ni l’amitié lise mon roman et l’analyse.

J’ai été bien chanceuse car, il y a quelque temps, la personne idéale s’est présentée. Quelqu’un qui ne me connaissait pas personnellement sauf à travers mon blog. Quelqu’un dont l’expérience professionnelle en communication donnait plusieurs outils intéressants pour me conseiller. Quelqu’un dont les connaissances littéraires étaient assez vastes pour qu’il puisse se faire une idée précise de la valeur de mon écriture à travers ce qui existe déjà. En plus, faut-il ajouter que, récemment, il avait relu et retravaillé un manuscrit pour une amie qui, par la suite, a été acceptée chez Québec Amérique? À cela s’ajoute que la personne en question est d’un naturel jovial, qu’elle est ouverte et cultivée. C’est quelqu’un qui aime lire, écrire et discuter. J’avais donc trouvé la personne idéale pour jeter enfin sur mon travail le regard extérieur tant attendu…

Mon lecteur a pris le temps de lire deux fois mon manuscrit. Une première fois pour s’en faire une bonne idée, la deuxième pour me faire des commentaires précis. Hier, nous nous rencontrions dans un petit café que j’aime et où se passent certaines parties de mon roman. Ce fut fort sympathique.

Avant de me présenter à cette rencontre, j’avais préalablement pris connaissance de ses remarques qu’il m’avait envoyées par courriel et de celles qu’il avait faites directement dans le manuscrit. J’ai eu un bon portrait de mes forces et de ce que je peux travailler. Lorsque nous nous sommes vus hier, nous avons discuté d’une foule de choses en dehors de mon roman spécifiquement. Puis, nous sommes revenus sur l’ensemble des remarques.

Mon lecteur trouve que j’ai une grande force dans les dialogues. Ce qui m’a vraiment surprise. J’évite en fait d’en écrire trop, de peur de devenir artificielle. Les dialogues sont souvent la partie faible des romans. C’est là qu’on voit si ça « colle » ou non. On me conseille donc d’en faire plus. D’utiliser cette force au lieu de passer par une narration à la 3e personne. Et puis, il semble que j’ai le sens de la chute. Mes fins de chapitres ont eu l’heur de plaire. Tant mieux! Et, dans l'ensemble, il a beaucoup aimé l'histoire et s'est attaché aux personnages principaux. Il a également aimé mon style très "saccadé", mes phrases très courtes, parfois d'un seul mot.

Maintenant, je fais quoi?

Ce qui ressort, en fin de compte, c’est que mon manuscrit est assez bon pour intéresser, s’il y a lieu, un éditeur. Ensuite, des corrections seront nécessaires, mais il est inutile de m’y plonger tout de suite. Je ne peux pas deviner où seront requis les changements… Je risque surtout de perdre du temps peut-être pour rien.

Je suis donc bien contente de cette expérience de relecture. C’est précieux. Et, comme si je n'avais pas assez reçu de sa part, il m'a offert un livre en cadeau, L'art d'écrire de Pierre Tisseyre. J'y trouverai sans doute des trucs et des conseils fort utiles. Je remercie, encore une fois, ce lecteur patient et prodigue de son temps!

Illustration: L'allusion au bonnet d'âne concerne le lieu de rencontre... Et non moi! :)

Comments

[Lux]

Tu as trouvé la perle rare, ne le perd pas de vue. D'après ses commentaires que tu rapportes, tu n'as pas le choix: tu dois continuer à écrire encore.

[marraine]

Un lecteur priviliégié, qui sait reconnaitre le talent.Bravo...
marraine

[L'Ethnologue]

Alors, c'est du positif, cela! Et c'est vrai qu'un oeil extérieur ne fait jamais de tort... C'est comme l'évaluation d'un mémoire ou d'une thèse... les évaluateurs finissent tjrs par voir qque chose que l'on a pas vu à force de toujours être "dedans".
Mais bon, j'espère que tout cela te rassure sur ton potentiel!